Page 20 Memoire_Daveloose
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le linge propre et l'on se rendit à notre nouvelle demeure provisoire. Ces vieilles demoiselles
nous reçurent fort aimablement. La chambre, très coquettement meublée, disposait d'un bon
lit, d'un lavabo, de fauteuils, de chaises. Savon, serviette de toilette, rien ne manquait. Notre
premier soin fut de nous déshabiller et, en tenue d'Adam, de procéder à un nettoyage
minutieux de tout le corps avant de revêtir du linge propre. Même si ce linge avait longtemps
séjourné dans la musette, il n'avait pas cette odeur de sueur et d'essence dont nous étions
pénétrés. Remis à neuf, on partit faire un petit tour en ville ; 15 minutes nous suffirent. Après
avoir tourné en rond autour de cette petite bourgade, on se dirigea vers le restaurant afin d'y
prendre le repas du soir. La conversation se prolongea, en fumant une cigarette, jusque 20h
puis, pour parfaire la digestion, on traîna la semelle jusque 20h45 et on se quitta pour
prendre un repos bien gagné. Arrivés chez nos hôtesses, on prolongea la soirée avec celles-
ci échangeant avec elles sur les événements présents, de nos inquiétudes profondes sur le
sort de nos familles mais aussi de l'espérance que rien de fâcheux ne leur soit arrivé. Nous
sautions ainsi de l'optimisme au pessimisme, ne sachant en réalité que penser mais nous
rattachant envers et contre tout à cette douce espérance qui nous gardera force et santé. On
prit congé de ces âmes charitables à 22h.
Lundi 24 juin
Après une assez bonne nuit car le lit était bien doux, on se réveilla à 8h. Toilette faite, on
descendit pour se rendre au café, sachant bien qu'à la cuisine, étant donné l'heure, ce n'était
pas la peine d'y compter. Mais nos hôtesses nous attendaient avec du café bien chaud et la
bouteille de rhum. On bavarda de nouveau avec elles, puis le soleil nous y invitant, Bartier et
moi partions nous promener en dehors de la ville, nous enfonçant dans la belle campagne
environnante et y découvrant des sites merveilleux. Au retour, l'église nous accueillit et notre
prière s'éleva pour la sauvegarde de nos êtres aimés. Après cette halte dans le sanctuaire,
on regagna le cantonnement où l'on retrouva un groupe de copains qui nous indiquèrent que
la poste acceptait, de nouveau, toute correspondance, même pour les régions envahies.
Sans espoir, j'écrivis plusieurs cartes FM pour ma femme et ma fille que j'aime, pour mes
parents et beaux-parents. Ce devoir accompli, sans excès de joie, n'espérant nullement
qu'elles parviennent à bon port, on se rendit à notre café. Le repas fut assez animé par cet
espoir que faisait naître cette correspondance autorisée. Après le café, je retournais terminer
mes comptes, puis on paya ceux qui étaient avec nous. La pluie s'était remise à tomber,
nous n'avions , pour nous en abriter que le toît d'un hangar, pour table un bastaing soutenu
aux deux extrémités par un tas de fagots et comme sièges des caisses vides. Quand le
dernier passa au guichet caisse, le repas du soir était déjà commencé, nous étions les
derniers à nous asseoir à la table d'hôte pour goûter les plats de l'ordinaire. Le dîner prenait
fin lorsqu'on nous avisa que le Capitaine Moulet voulait nous voir tous, de suite, à la cuisine.
On but notre café, on paya, et on se rendit au rendez-vous. Ce fut pour apprendre que, le
lendemain, on pliait bagages et que le départ était fixé à 5h pour l'itinéraire suivant :
NAUCELLE, (VIADUC DE VIAUR), TANUS, LES FARGUETTES.CARMAUX, PONT-DE-
BLAYE, LE GARRIC, L'HERMET, ALBI, REALMONT, ROQUECOURBE.
Nous quittions l'officier pour nous promener un peu, dégustant sur notre route, un nouveau
café au bistrot des sports, puis chacun regagna son logement afin de faire une bonne nuit et
se trouver prêt à affronter une nouvelle étape... On prévînt nos logeuses de notre départ en
leur demandant un réveil et leur souhaitant bonne nuit.
Mardi 25 juin
5h30 : réveil difficile. Les paupières encore lourdes de sommeil, on se leva sans
enthousiasme. Gestes habituels : se laver, s'habiller et une fois de plus refaire son baluchon.
On descendit sur la pointe des pieds afin de laisser dormir les braves gens qui nous avaient