Page 58 Memoires de guerre 1914 1918
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Pierre Charmoy
En fin de journée, nous sortîmes de notre trou, et, moitié rampant moitié mar-
chant, fîmes le chemin inverse de celui de la matinée. Il y avait de nombreux blessés
dans les tranchées, beaucoup de noirs, même ceux qui n’étaient que peu blessés restaient
là inertes, et il fallait les rudoyer un peu pour leur faire prendre le chemin des postes de
secours. Il était pleine nuit quand nous rejoignîmes notre groupe, on se demandait ce
que nous étions devenus.
La nouvelle de l’échec de l’attaque se répandait, cela n’arrangeait pas le moral. Les
jours suivants, les attaques continuèrent et les lignes finirent par se stabiliser. On avait
installé un nouvel observatoire. Le 29 avril, c’était mon tour d’y aller, je repris le chemin
des lignes que je commençais à bien connaître. Il n’y avait pas encore de boyau creusé
pour relier les anciennes premières lignes allemandes et françaises et il fallait traverser le
fameux Chemin des Dames qu’on reconnaissait uniquement parce qu’à cet endroit il y
avait des cailloux dans la terre bouleversée. Il fallait faire vite car il était battu par les
mitrailleuses, mais il n’y avait que quelques dizaines de mètres à parcourir. Après avoir
sauté dans l’ancienne tranchée allemande je rejoignis l’observatoire, un peu en avant. Le
mauvais temps avait cessé, il faisait un beau soleil et le terrain était devenu presque sec.
Le réglage de tir commença, tout se passait normalement, c’était plutôt calme, quelques
rafales de mitrailleuses, quelques salves de 77, mais dans la tranchée on était bien à
l’abri… jusqu’à ce qu’un de ces 77 tombe et éclate juste sur le rebord de la tranchée. Je
sentis que j’étais touché un peu en dessous de la pointe de la hanche droite, en même
temps que musette, bidon, masque à gaz que je portais en bandoulière tombaient par
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