Page 26 Memoire_Daveloose
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Mercredi 14 août
Ce matin , comme les jours précédents on eût appel à 7h30. Celui-ci terminé, je retournais
au logement faire la chambre, Madame Bouche étant indisposée. Dès que j'eus terminé ce
travail, avec les mêmes amis, nous sommes repartis à Castres à bicyclette rechercher la
montre.
Le ciel était bleu, le soleil éblouissant mais un petit vent frais nous fouettait. En promeneurs,
on prit un autre chemin que la veille, petit sentier le long de la falaise boisée qui nous
ombrageait. A partir de Burlats, on longea la rivière du nom de l'Agout, la même qui arrose
Castres et Roquecourbe. Ce coin que nous ne connaissions pas était superbe. Je dis tout
haut ce qu'André et moi pensions tout bas: si dans ce lieu enchanteur, nous nous
promenions avec nos êtres chers que nous serions heureux et que la nature nous paraîtrait
plus belle encore. Cette pensée exprimée nous transporta là où se trouvent ceux que nous
aimons. Ce songe fut de courte durée et force fut de revenir à la réalité pour continuer d'être
le compagnon de voyage de notre ami Jean Bouche. Arrivé à Castres, j'allais chercher ma
montre, puis, en prévision d'une correspondance prochaine avec mes chéries, joie seule
possible à envisager pour maintenant, je fis l'acquisition d'un film sachant que Jean
possédait un appareil. Ces photos que je projette de prendre viendront ensoleiller la demeure
de mes adorées et celle des chers parents.
On revint à Roquecourbe par les mêmes chemins pour arriver à l'heure du déjeuner. Le
repas terminé, je m'allongeais sur le lit pour faire la sieste et, vers 3 heures, j'entrepris de
faire ma lessive, flanelle de corps, chemise, caleçon, chaussettes, serviettes de toilette et
mouchoirs. Je pris cette décision depuis la dissolution de la compagnie. Ce petit travail
m'enchante, me fait passer le temps et me fait gagner 9 francs, somme qui était réclamée
chaque semaine par la blanchisseuse. L'économie est de rigueur et je calcule afin de ne pas
dépenser inutilement, pour apporter au foyer toutes mes économies malgré les temps
difficiles que nous traversons. Ma lessive achevée, comme nous sommes à la veille de
l'Ascension, je cirais mes bottines jaunes pour le lendemain ainsi que celles de semaine, puis
je fis la toilette du corps à l'eau froide, soins d'hygiène que je me donne tous les deux jours.
Ainsi j'arrivais à l'heure du dîner. Ce dernier terminé, en fumant une cigarette , j'allais
bavarder avec l'ami André qui avait pris la fonction de Chef de poste depuis 17 heures. Je
retournais ensuite me coucher, non sans avoir fixé sur le mur, face au lit, les photos de tous
ceux que j'aime, leur envoyant, comme à chaque soir, mes souhaits de bonne nuit, mes bons
baisers et mon ardent désir de les revoir bientôt.
Jeudi 15 août
Réveillé par les cloches de l'église appelant les fidèles pour la messe de 7 h, je sentais que
moralement la journée serait mauvaise. Aussi, de suite, je sautais du lit, me lavais et
m'habillais puis partais pour l'église où je restais à prier pour les miens jusqu'à 7h25,
demandant à la Sainte Vierge de les protéger tous, de leur permettre de manger à leur faim
et de les garder en bonne santé. Je me rendis ensuite a l'appel puis, de retour, je fis ma
chambre, je pris mon petit déjeuner en lisant le journal local et en attendant l'heure de la
grand-messe fixée à 10 heures. Après l'office, j'allais tenir compagnie à André de garde puis
saluer les autres copains pour finalement rentrer au logement pour le déjeuner. Au cours du
repas, on vint m'inviter à me rendre avec des amis à Castres pour assister à une séance de
ciné que je refusais et pour cause : 1° j'ai trop grand souci des miens dont je n'ai toujours pas
de nouvelle , 2° l'argent que je devrais dépenser sera peut-être utile à ceux que j'aime. Vers
14 heures, je fis la sieste, puis installé, dans un fauteuil, j'ai fini la journée en relisant les
dernières lettres reçues de ceux que je chéris.