Page 26 Memoires de guerre 1914 1918
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Pierre Charmoy





















































Enfin nous pûmes nous installer dans notre abri, il y avait, je crois, trois étages de
deux lits (un grillage posé et tendu sur un cadre en bois et une paillasse), nous devions
être une douzaine qui appréciaient fort ce nouveau confort après les nuits passées sur la
dure. La Champagne pouilleuse est terriblement sèche, on nous apportait de l’eau tous
les jours à raison de deux litres par homme et par jour pour boisson, lessive, toilette. Le
génie creusa un puits pas bien loin de la batterie, je ne sais quelle était sa profondeur,
mais il y avait trois étages de pompes – à bras naturellement – et je me souviens être
descendu au fond pour actionner la pompe la plus basse pendant une heure. Un jour
nous eûmes la permission, mon camarade Mustelier et moi, d’aller à l’arrière sur les
bords de la Suippe pour faire la lessive, nous en avons profité pour prendre un bain.
Il y avait beaucoup de troupes à l’arrière. Le ravitaillement ne se faisait que la nuit
et uniquement avec des chevaux attelés à toutes sortes de véhicules ; les munitions, les
vivres, les matériaux pour les abris, tout nous parvenait ainsi et les chariots vidés, les
attelages repartaient à l’échelon qui se trouvait à une douzaine de kilomètres en arrière.
Ces milliers de chariots en marche faisaient dans la nuit un bruit uniforme, sourd,
immense que j’entends encore et qui nous remplissait de fierté et d’espoir : comment
l’ennemi pourrait-il résister à une telle accumulation de moyens ?





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