Page 83 Memoires de guerre 1914 1918
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mémoires de guerre (1914-1918)



9. « à l’infini ce sont des séries de cuvettes trop remplies que l’averse inexorable fait déborder les
unes sur les autres (la terre) un déluge de fer l’a tellement criblée, brassée, retournée, qu’elle
ne présente plus qu’une immonde bouillie brune où tout s’enfonce. » (Pierre Loti)


10. Le tunnel de Tavannes était situé sur la ligne de chemin de fer reliant Verdun à Metz. C’était
un boyau long de 1 500 m et large de 5 mètres seulement. Il abritait 1 500 à 2 000 hommes
au repos, ou blessés dans des postes de secours aménagés, mais aussi de nombreux dépôts
de matériels de toutes sortes et de munitions, le tout dans un air pestilentiel, irrespirable,
dans la boue, les immondices et les déjections. Un couloir de un mètre de large permet-
tait la circulation jour et nuit des troupes montantes et descendantes, l’évacuation des bles-
sés et des morts et même le passage des animaux de bât. On y voyait à peine, et un seul
robinet d’eau avait été installé au milieu du tunnel… Les témoignages des soldats parlent
d’un « égout humain », d’un « tunnel de misère », d’un « cloaque » . Le 4 septembre 1916,
suite à l’explosion accidentelle d’une grenade, le tunnel prend feu et se remplit de fumée. Le
brasier dura trois jours. Il y eut environ 1 000 morts.





























11. On connaît l’attachement de la paysannerie à ses chevaux : une carte postale de 1914 montre
ainsi une paysanne et son cheval face à un officier de réquisition : « Gardez mon homme
tant que vous voudrez, mais laissez moi au moins ma jument. »
La souffrance des chevaux est racontée dans de très nombreux témoignages de combattants,
elle est perçue comme particulièrement injuste.
« Les chevaux n’en pouvaient plus. Partout dans les plaines, il en était enlisés qu’on était
contraints d’abandonner. Pendant plusieurs jours, ces pauvres bêtes s’agitaient dans la boue
puis mouraient d’épuisement. » (Artilleur Puget, avril 1915)
« Les cris continuent. Ce ne sont pas des êtres humains qui peuvent crier si terriblement.
Kat dit ‘‘chevaux blessés’’. Je n’ai encore jamais entendu crier des chevaux et je puis à peine
le croire. C’est la créature martyrisée, c’est une douleur sauvage et terrible qui gémit ainsi.
– Je voudrais savoir le mal qu’ont fait ces bêtes.
– Je vous le dis, que des animaux fassent la guerre, c’est la plus grande abomination qui
soit. » (Erich Maria Remarque, « à l’ouest, rien de nouveau »)
Environ 1 140 000 chevaux meurent de leurs blessures, d’épuisement ou de maladies.


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